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Part of the book series: Phaenomenologica ((PHAE,volume 227))

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Abstract

Le chapitre quatorze interroge le délire et l’hallucination en schizophrénie comme deux processus intimement liés. Pour ce faire, nous nous opposons à un double rabattement inacceptable, l’un, du délire sur un simple trouble du penser, l’autre, de l’hallucination réduite à un trouble de la sensibilité. À l’encontre de ce réductionnisme, nous affirmons que tout vrai délire, en schizophrénie, puise dans le registre de l’hallucination, et que toute hallucination puise dans celui du délire. Nous concluons sur une seule et même déstructuration de l’être subjectif.

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Notes

  1. 1.

    Il est en effet possible de retrouver ces trois critères dans la définition du délire de l’actuel DSM-5. Étrangement, nous n’avons pas pu trouver la traduction de cette définition dans la version française de l’actuel DSM-5. Dans la version anglaise, le délire est défini comme « A false belief based on incorrect inference about external reality that is firmly held despite what almost everyone else believes and despite what constitutes incontrovertible and obvious proof of evidence to the contrary. » (APA 2013, 819) Dans cette définition, nous retrouvons immédiatement la « certitude subjective incomparable » du premier critère de Jaspers ainsi que « l’impossibilité d’ébranler cette certitude » du deuxième critère. En ce qui concerne le troisième – l’impossibilité du contenu du délire –, celui-ci pourrait plus ou moins recouvrer ce que le DSM désigne par la fausseté de la croyance (le délire est un false belief). Bien entendu, fausseté et impossibilité ne sont certes pas la même chose. Une idée fausse n’est pas nécessairement impossible – loin de là. Mais, l’inverse, pour le moins, se révèle vrai : toute idée impossible est également une idée fausse.

  2. 2.

    Cf. : « Délire […] signifie une transformation dans la conscience globale de réalité (s’exprimant secondairement dans des jugements de réalité) qui s’élève sur ces expériences, sur le monde de la praxis, sur les résistances et les significations […]. » (Jaspers 1965, 80)

  3. 3.

    Il est certes vrai qu’un tel court-circuit entre apodicticité et expérience subjective n’est plus communément admis, aujourd’hui, en phénoménologie. De fait, il s’agit d’un point de vue initialement promu par Husserl, et qui fait partie de l’orientation épistémologique de sa propre phénoménologie. Cette dernière a été massivement concernée par la recherche d’une « fondation ultime » de la connaissance dont elle trouve la possibilité dans les deux outils méthodiques fondamentaux que sont l’épochè et la réduction (notamment depuis 1907, année du fameux tournant « transcendantal » de Husserl).

    Aujourd’hui, un tel projet fondationnel semble désuet. Plusieurs raisons peuvent être mentionnées pour expliquer le changement de paradigme à son égard. Tout d’abord, l’avancement ultérieur de la phénoménologie de Husserl lui-même – notamment dans le champ de l’affectivité, de l’intersubjectivité, de la temporalité et de la corporéité – a fait accéder la phénoménologie à des registres enfouis de la constitution du sens. Dans ces registres « infra-rationnels », le donné est fondamentalement fuyant, instable et donc loin d’être intuitionné avec une évidence apodictique. À cela, on pourrait ajouter que, déjà en 1912, Max Scheler a exprimé ses réserves par rapport à une immanentisation de la connaissance phénoménologique (Scheler 1955). Selon lui, l’intuition interne, et plus spécifiquement la connaissance de soi, n’est pas moins susceptible à l’illusion que la connaissance des choses externes. Plus récemment, des résultats d’autres domaines de recherche, tels que la psychanalyse, l’anthropologie et la psychiatrie, ont fourni des indices massifs pour le caractère trompeur et illusoire du soi et de ses tentatives d’auto-compréhension. L’ego en psychanalyse, par exemple, est tout sauf une « source de droit » (Rechtsquelle) ultime pour la connaissance. Que ce soit dans la pensée lacanienne ou sartrienne - identiques sur ce point-ci –, l’ego est, pour le sujet, un objet d’aliénation qui est incapable d’en rendre une image véridique.

    Cependant, tout en voyant le bien-fondé de ces critiques, nous croyons qu’il y a encore quelques vérités dans une vision cartésienne de la subjectivité. Car, bien que le sujet puisse toujours se tromper à l’égard de ce qu’il perçoit de lui-même, la simple donation de l’expérience ne peut guère être mise en doute. Le fait que le sujet éprouve un évènement, qu’il y ait une donnée et que, enfin, quelque chose ait lieu en lui, tout cela nous semble incontestable. Si donc le sens de ce que nous vivons est toujours sujet à être corrigé dans le futur et invalidé par le cours ultérieur de l’expérience – « ceci n’a pas été un souvenir, mais au contraire un rêve, se donnant comme un souvenir » –, le fait qu’il y ait sens est néanmoins irréfutable. Autrement dit, si l’immanence ne peut pas assurer l’apodicticité du contenu d’une expérience, elle le peut à l’égard de l’expérience elle-même considérée comme donation pure. C’est cette version revisitée du cartésianisme phénoménologique qui nous sert, par la suite, à mieux comprendre l’expérience du délire.

  4. 4.

    Chris Walker a récemment montré que l’affirmation de ce « caractère de corporéité (Leibhaftigkeitscharakter) » s’inscrit, pour Jaspers, dans une discussion qu’il a eue avec Goldstein – justement autour de la question du critère de distinction entre hallucination et pseudohallucination (cf. : Walker 2013). Goldstein s’est référé, avant Jaspers, au même travail de Kandinsky. Il y a interprété la différence entre hallucination et pseudohallucination comme une différence de degré. Cette solution est inacceptable pour Jaspers.

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Grohmann, T. (2019). Délire et hallucination. In: Corps et Monde dans l’Autisme et la Schizophrénie. Phaenomenologica, vol 227. Springer, Cham. https://doi.org/10.1007/978-3-030-14395-4_14

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